La marionnette est un art trop léger pour ne pas le prendre au sérieux !

La marionnette est un art trop léger pour ne pas le prendre au sérieux !

Il l’a fait ! D’un pas martial et sûr, il a traversé la cours Napoléon !
Mais pourquoi je n’ai pas eu envie à mon tour de foncer au Louvre et d’agiter le petit drapeau bleu blanc et rouge ? Bien sûr, j’étais content de l’écart conséquent avec la pythie décolorée qui a le grand mérite de me mettre dans une agitation féroce lorsqu’elle évoque la France apaisée. Comme beaucoup, j’ai voté utile et contre alors que je m’étais promis de ne plus le faire. Mais la peur de la dragonne qui crache du venin m’a convaincu. Et voilà que plus d’un roi nous avons un empereur ! C’est quoi le signal, c’est Waterloo ou Austerlitz ? Peut-être n’avions-nous pas vu que l’extrême centre était en train d’éclore sous nos yeux ? Et puis ça veut dire quoi de fêter sa victoire au carré du Louvre si ce n’est que ce dernier se trouve entre la Bastille ou République, tous deux emblématiques de la gauche, et place de la Concorde où Chirac et Sarkozy avaient célébré leur grandeur et leur décadence ?
Je suis pour la nouvelle génération et la parité absolue, mais la nouveauté n’aurait-elle pas été d’élire une femme présidente et de n’accepter au Parlement aucun député ayant déjà servi ? Et la Sixième République ? Et le vote proportionnel ? La reconnaissance du vote blanc et du vote des immigrés ?
J’ai décidé de faire confiance à notre nouveau Président pour avoir une forme de cohérence et être lanceur d’alerte au cas où le petit aiglon deviendrait vautour.

Et puis il ne manque que la barbe à notre insoumis national pour être un Fidel Castro dogmatique et ennuyeux ! Dommage, car c’est son programme que je trouve le plus substantiel et progressif.
Quand vont-ils donc comprendre ces figures clonées et hologrammées qu’on ne vote pas pour eux mais pour ce qu’ils représentent et incarnent ? Il n’y a pas plus triste que toutes ces têtes relookées, reliftées, photoshoppées, collées sur les panneaux électoraux. “Des clowns, des marionnettes !” j’entendais l’autre jour en faisant mon devoir de citoyen. Et voilà nous y sommes ! Qui manipule qui et pour quelle cause ? Il est de bon ton de dire que nous sommes tous la marionnette de quelqu’un. À propos de notre art, ce ton sarcastique et condescendant me hérisse souvent le poil. Il est à la mesure de la façon dont les politiques et les médias ont traité l’art et la culture durant cette campagne.

Frères humains qui vous prenez pour des grands penseurs et qui vous vous posez comme nos guides éclairés, un peu d’humilité que diable ! Sentez le fil qui vous tire au milieu du dos, lâchez les bras et les épaules, ayez la sensation d’être tiré par le haut. Et si il y en a un qui coupe la ficelle essayez de voir celui qui a encore les ciseaux dans la main pour lui couper à son tour la chique et lui enlever son contrôle !

La marionnette est un art trop léger pour ne pas le prendre sérieux ! Elle est une métaphore poétique et est par nature politique puisque elle est décalée et pose questions sur le sens de l’inanimé. Et c’est bien nous qui décidons de donner une âme à une forme ou à un objet. Comme le suggère Kleist, elle a le sens de la gravité. Voilà pourquoi Hélène Viaux (dans Max Gericke ou pareille au même) anime les mannequins en les effleurant même si il n y a pas de manipulation directe. Merci à tous ceux qui nous soutiennent dans cette aventure singulière, nous en avons besoin ! Avec l’équipe de La Nef nous assumons le choix d’une dramaturgie exigeante à la recherche d’un sens en questionnement permanent.

Je ne vais pas me faire des amis mais je trouve souvent léger et même parfois absent le contenu des certains spectacles de la Biennale internationale des arts de la marionnette qui est encore en cours. Le propos et la forme sont alléchants et puis ça retombe par manque d’une écriture véritable. C’est ce que j’appelle des spectacles FBI ou Fausses Bonnes Idées. Camarades artistes, nous avons une grande responsabilité car nous avons le privilège de raconter des histoires, de la mythologie au fait divers nous ne sommes constitués que de ça.

Le 11 juin lors des portes ouvertes de La Nef nous présenterons un état des lieux des chantiers et appels à tes mains mais aussi des projets personnels des artistes rencontrés lors de cette première ébauche d’une écriture en mouvement. Et puis nous sommes plus que ravis et enchantés de vous proposer de venir le 16 juin au Théâtre de Verdure - Murs à Pêches de la Girandole à Montreuil passer une soirée sous les étoiles et dans la verdure avec nos stars de la saison à découvrir. Vous serez damnés par Luciano qui tous les ans incarne Dieu en personne si vous ne venez pas gouter les pêchés de La Nef !

Un nouveau site est lancé, merci à Sarah et Julien d’avoir œuvré de très nombreuses semaines là dessus ! Merci d’avance pour vos retours et vos critiques.
Et puis Solène qui s’occupe de la diffusion et de la production arrive avec son rire et son sérieux, Angela avec qui on collabore depuis 4 ans a décidé de mettre ses compétences au service d’autres projets. N’ayant rien à lui reprocher j’en suis d’autant plus attristé mais c’est vrai que la vie est aussi faite de séparations ! Quand des collaborateurs vous quittent heureux et fiers du travail accompli c’est un peu juste et un peu moins difficile. Bon vent et mille mercis à toi Angela.

Jean-Louis Heckel
23 mai 2017